La nébuleuse Notre-Dame de Dijon

Des églises de la ville, elle est la doyenne. On dit souvent qu’elle est l’exemple même de l’architecture gothique bourguignonne. Mais surtout, la Notre-Dame dijonnaise questionne par son originalité.

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Par Eva-Marie Debas
Rubrique « Chouette Secret »
en partenariat avec l’office de tourisme de Dijon
Photo de une : Clément Bonvalot

Classée aux Monuments Historiques depuis le XIXème siècle (à l’exception de la chapelle de l’Assomption, de la sacristie et de la galerie, inscrites en 2002), l’église Notre-Dame étonne nombre d’historiens et fascine les touristes. Avec son architecture singulière et ses symboles spirituels, il y a de quoi. Voilà quelques-uns de ses mystères.

« Un tour de force technique »

Construite en 1220, l’actuelle église gothique a souvent été rénovée et perdure dans le temps. Pas plus de 30 ans furent nécessaires à l’édification de la belle. Un temps record pour l’époque ! Plus étonnant encore, sa confection. La place Notre-Dame faisant défaut à l’architecte (resté mystérieusement inconnu), il usa de techniques inédites pour utiliser un maximum de surface au sol à l’intérieur de l’édifice. Il éleva l’église sur des piliers, en dépit de la technique habituellement utilisée voulant que les charpentes et les toits des églises gothiques repose sur des arcs-boutants.

L’architecture de Notre-Dame a donc très tôt étonné les historiens. Au XVIIIème siècle, plusieurs architectes français furent frappés de la légèreté de la structure de l’église et de l’économie des matériaux. L’un deux, Pierre Patte, la qualifiera même de « tour de force technique ». Au siècle suivant, c’est Eugène Viollet-le-Duc, célèbre architecte de son temps, qui mit la lumière sur les techniques utilisées pour sa construction: une architecture innovante pour un style gothique, en intérieur comme en extérieur. Pour les curieux avertis, une étude récente du Centre de Recherche d’Histoire Culturelle et Sociale de l’Art devrait compléter la chose.

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Symboles légendaires et légendes symboliques

Outre ces quelques mystères architecturaux, qui font douter de sa filiation purement gothique, l’église Notre-Dame est connue et reconnue grâce aux nombreux symboles historiques et religieux qu’elle abrite. On n’oubliera pas de mentionner la statue de Notre-Dame de Bon-Espoir qui attire les fidèles, ses quelques vitraux d’époque, son célèbre Jacquemart qui sonne l’heure, la Chouette en son flanc gauche ou encore sa cinquantaine de gargouilles…

Ses gargouilles, tiens, parlons-en ! Nombreuses mais discrètes par leur emplacement, elles surveillent le parvis de Notre-Dame. Tous les Dijonnais qui ont un jour levé la tête les ont aperçues, majestueuses et grimaçantes. Pour l’anecdote, celles d’aujourd’hui sont seulement décoratives, et ont perdu de leur vocation première : évacuer l’eau de pluie. La légende raconte qu’un événement macabre obligea l’Eglise à retirer les originelles avant même la fin des travaux. Un usurier (sorte de banquier de l’époque) aurait en effet trouvé la mort le jour de son mariage, après que la tête d’une gargouille (représentant justement un usurier) se soit malencontreusement détachée. Ce mythe a en fait été inventé par un prédicateur pour illustrer le péché d’avarice. À l’époque, l’Eglise critiquait voire interdisait la pratique de l’usure. Elle considérait alors que le prêt à intérêt était un moyen injuste et déshonorant de s’attribuer le bien d’autrui. On se doute que l’injonction a depuis disparu…