Anne Parent, parité bien ordonnée…

Elle fut la marraine de la première édition des Trophées des femmes de l’économie en Bourgogne-Franche-Comté, ce mardi 14 novembre. La viticultrice Anne Parent nous parle de gestion d’entreprise et de parité. Avec un discours franc et gouleyant.

Par Dominique Bruillot
Photo : Michel Joly

Au lendemain de ces belles vendanges, elle a le sourire. « On a enfin retrouvé une récolte normale, je n’étais plus habituée à avoir une cuverie pleine et à devoir commander des futs », s’étonne encore Anne Parent. Après les années de grêle et de gel qui ont eu raison de certains domaines, la viticultrice apprécie cette bouffée d’oxygène : « Dans beaucoup de points, la gestion d’une entreprise comme la nôtre active les mêmes ressorts que dans la métallurgie ou dans toute autre activité ; j’en discute avec mes amis qui, comme moi, sont conseillers du commerce extérieur. La différence, c’est que nous sommes tributaires de la météo. »

« On est coincés »

La marraine de la première édition des Trophées des femmes de l’économie en Bourgogne-Franche-Comté, qui s’est déroulée le 14 novembre au château de Meursault, sait donc sortir de son champ viticole pour raisonner en véritable chef d’entreprise : « Nos particularismes nous conduisent à capitaliser le haut de bilan. C’est comme pour une maison, si tu la construis sur des sables mouvants, sans fondation, c’est dangereux. Il nous faut aussi toujours investir à bon escient, y compris quand la récolte est mauvaise. »

Dans une appellation de plus en plus attractive, où le foncier est une donnée perturbante (plus des deux tiers des sols de Pommard n’appartiennent plus aux familles locales), la croissance externe est en même temps devenue quasi impossible. « Dans l’industrie, on peut se développer, construire un bâtiment, faire des acquisitions… Nous on est coincés, sans oublier une transmission devenue de plus en plus compliquée », poursuit celle qui reste naturellement obsédée par le maintien « de grands équilibres entre compétences, commercial, investissements. »

Double parité

Un discours qui n’est donc pas plus féminin que masculin. Mais cette première édition régionale des Trophées des femmes de l’économie lui donne l’occasion d’apporter son éclairage de femme dirigeante : « Les mauvaises langues diront c’est le MLF de l’économie alors qu’on est seulement en éclairage des compétences et des parcours de femmes. Ce n’est pas l’entreprise qui est récompensée mais un parcours de vie souvent étonnant. Je ne suis pas une féministe pure et dure, j’étais contre la parité pour la parité, mais le débat a fait avancer les choses. Sans cela, j’en prends le pari, rien n’aurait changé. »

Anne Parent est pourtant un « double produit de la parité », et elle l’assume. Une parité qui vaut à la fondatrice de l’association des Femmes et Vin de Bourgogne, d’être à la fois conseillère du commerce extérieur depuis 2009 et désormais conseillère départementale avec son binôme Denis Thomas. Donc de constater que « ces femmes, qui occupent la moitié de l’hémicycle, ne sont pas des pots de fleurs et s’impliquent largement autant que les hommes. » Ça, c’est dit.

D’autres institutions devraient s’en inspirer et prendre le pli. « J’ai été pendant dix ans la seule femme membre du comité permanent du Bivb, depuis mon départ, aucune femme ne m’a remplacée », se désespère Anne Parent. Qu’il est encore long le chemin des vignes…