Héros ordinaires #4 – Lakhdar Zelbouni, président de l’épicerie solidaire Le Cœur Dijonnais

Ils sont les petites pierres apportées à l’édifice de notre rémission. Portraits de ces travailleurs ordinaires, des gens simples et essentiels, sous l’œil du photographe Jean-Luc Petit. Épisode 4 : Lakhdar Zelbouni, président de l’association Le Cœur Dijonnais, qui anime notamment une épicerie solidaire.

Texte : Eric Perruchot
Photos : Jean-Luc Petit


Le message sur répondeur est laconique : « Le Cœur Dijonnais est ouvert pendant la période du Covid-19, du lundi au samedi de 10h à 18h. » Autrement dit, c’est journée continue pour l’équipe de Lakhdar Zelbouni. L’épicerie associative est à l’écart des beaux quartiers, dans la zone industrielle Cap Nord.

L’annonce du confinement n’a pas changé la raison d’être de l’association, sur le front solidaire depuis six ans. « Elle permet aux foyers qui vivent en-dessous du seuil de pauvreté de s’alimenter à moindre coût, en leur proposant un large choix de marchandises et de produits de première nécessité », résume le président Lakhdar, qui dénombre à ce jour 3 753 bénéficiaires de la métropole dijonnaise.

Le Cœur Dijonnais pour tous

Au premier jour de confinement, l’équipe de 17 salariés a été réduite de moitié. « Pour ceux qui ont des enfants, il était plus judicieux qu’ils restent chez eux. » De même pour les bénévoles. Moins fréquentée, l’épicerie n’a pas pour autant baissé d’intensité. L’association a même pu venir à la rescousse des épiceries classiques dévalisées en pâtes, en riz ou en farine dès la première semaine.

« Une chaîne de solidarité est née assez rapidement, j’ai observé un changement de mentalité, des choses ont bougé dans certains comportements. »

Et pour éviter le gâchis de nourriture, collectée chaque jour auprès des grandes surfaces et de la Banque alimentaire, Le Cœur Dijonnais a ouvert exceptionnellement ses portes à tous (les seuls bénéficiaires devant, en temps normal, être orientés par les services sociaux). Sans enseigne ni vitrines lumineuses, le petit magasin fonctionne actuellement comme une supérette, avec l’apanage habituel de ce genre de lieu : masques et gants en latex, distributeurs hydroalcooliques, cordon sanitaire à l’entrée et plexiglas aux caisses.

Lakhdar Zelbouni et son équipe réduite de moitié à cause du Covid-19 ont continué à œuvrer pour proposer des denrées variées et palier la pénurie dans les supermarchés. © Jean-Luc Petit

Recrues inattendues

La démarche solidaire qui caractérise ce style d’épicerie a fait mieux que fonctionner. « Nous avons pu envoyer une palette de gants et du gel en bidon au CHU Dijon et participé aux colis pour les personnes isolées », se félicite le président. En retour, Le Cœur Dijonnais a trouvé des recrues inattendues auprès des jeunes du quartier. « Une chaîne de solidarité est née assez rapidement, j’ai observé un changement de mentalité, des choses ont bougé dans certains comportements », s’enthousiasme Lakhdar, à qui de nombreux jeunes, certains en rupture scolaire, ont proposé leur aide. « La crise aura au moins permis ça », conclut-il sobrement.

L’amorce du déconfinement va permettre de relancer l’ouverture d’une nouvelle épicerie (Le Cœur bombi), prévue le 24 mars dernier, à Chenôve. Mais aussi de réenvisager des sorties intergénérationnelles en car, organisées par l’association. Enfin, dans un proche avenir, un restaurant, accolé à l’épicerie dijonnaise devrait voir le jour. Il permettra d’attirer les clients potentiels de la zone industrielle et surtout d’éviter un grand gaspillage de nourriture. Le Cœur Dijonnais fait donc dans le concret. Du solide, du solidaire.


Épicerie sociale et solidaire Le Cœur Dijonnais, du lundi au samedi, de 10h à 18h – 09.67.57.08.04 / 06.86.06.20.77 – 3 rue Clément Desormes à Dijon.

Déjà parus

Épisode 1 : Carole Descharmes, médecin généraliste à Gergy (71)
Épisode 2 : Romain Bormel, conducteur de benne à ordures à Dijon
Épisode 3 : Magali Robert, caissière au Super U d’Arc-sur-Tille