Hôtellerie-restauration : Patrick Jacquier (Umih 21) veut croire au tourisme de proximité

L’hôtellerie et la restauration naviguent à vue. Ce secteur sinistré par le Covid-19 a de bonnes raisons de croire aux vertus du tourisme de proximité. Patrick Jacquier, le président de l’Umih Côte-d’Or confirme.

Par Dominique Bruillot

Il n’est pas utile de revenir sur les faits que nous connaissons tous, pour imaginer à quel point les cafetiers, hôteliers, restaurateurs et discothécaires (CHRD) sont à la dérive. 100% des cafés et restaurants (plus de 800 recensés rien que sur le territoire de Dijon Métropole) ont baissé leur rideau depuis la mi-mars. La quasi-totalité des hôtels aussi. Du jamais vu, même pendant la guerre.

Des cuisiniers vont relancer leurs pianos pianissimo, avec des propositions de plats à emporter. Ce ne sera qu’un premier pallier de décompression avant le plein retour aux affaires. Côté hôtels, il faudra patienter encore longtemps avant de retrouver un taux d’occupation digne de ce nom.

L’Umih Côte-d’Or sur le front

Dans ce contexte, l’Umih Côte-d’Or, syndicat français numéro 1 du secteur, est sur tous les fronts. « Elle réagit de manière admirable, se félicite son président Patrick Jacquier. Notre secrétaire générale Isabelle Grandin et son équipe ont mis en place une véritable cellule de crise pour nos 600 adhérents. » Concrètement, il a déjà fallu répertorier toutes les aides existantes et entrer en contact avec plus de la moitié de ces adhérents. Un partenariat avec Anne Vrdoljak, spécialiste de l’accompagnement des entreprises, permet aussi des suivis individualisés des démarches financières.

« Mon fils Anthony, qui dirige l’Ibis Dijon Gare, m’a demandé : « Mais comment on ferme un hôtel ? » Je lui ai répondu que je n’en savais rien, que je n’avais jamais eu à le faire… »

« On a fait un tableau complet : 20% de nos adhérents pensent ne pas pouvoir s’en sortir ; on est entré dans un monde inconnu en très peu de temps. » Patrick Jacquier a lui-même vécu la situation en direct : « Mon fils Anthony, qui dirige l’Ibis Dijon Gare, m’a demandé : « Mais comment on ferme un hôtel ? » Je lui ai répondu que je n’en savais rien, que je n’avais jamais eu à le faire… » Ce qui en dit long sur l’énormité de la situation.

La première pensée va en direction des hommes et des femmes qui font le CHR. « Notre préoccupation prioritaire a été de savoir comment les protéger de ce mal. Nous l’avons fait en toute transparence, avec un courrier pour leur expliquer la situation. » Le confinement a son propre rythme biologique. Dans le groupe Hôtels Bourgogne Qualité (Grand Hôtel La Cloche, Le Central…) dirigé par Patrick Jacquier, c’est réunion quotidienne via WhatsApp avec tous les responsables de sites. Puis chacun de ces cadres fait de même avec ses propres collaborateurs. Jamais l’échange n’aura été aussi important pour le moral des troupes bloquées à la maison.

Après avoir résisté un temps au début du confinement, le Grand Hôtel La Cloche a été mis sous cloche. Une situation inédite, même pour son propriétaire expérimenté. © D.R.

Hygiène en formation

Cette morne plaine est malgré tout traversée de quelques lumières. « Notre responsable web est là pour conserver le lien avec nos clients, et les résultats sont plutôt sympas, nous n’avons jamais eu autant de followers. Dans le même temps, cette situation inédite a créé une solidarité entre les équipes. »

Ce temps du retrait et aussi le temps des remises en question. L’Umih a fait appel à une spécialiste de l’hygiène, Meilleur ouvrier de France, pour organiser en visioconférence des séminaires de formation aux barrières sanitaires, de ce qu’il faut faire ou pas. Un peu comme ce que peut être l’entrainement pour les sportifs, avant qu’ils ne reprennent la compétition.

Sauvés par le tourisme régional ?

Chaque jour passe avec son lot d’annonces. Prêts garantis par l’État, chômage partiel, report des échéances… « L’État a fait ce qu’il fallait dans un premier temps, mais cela ne suffira pas, il faut des suppressions massives de charges », rappelle le président de l’Umih Côte-d’Or. Il n’y a pas grand-chose non plus pour éclairer la profession sur le court terme. Au traumatisme sanitaire s’ajoutera la crise financière dans un contexte où le tourisme international, qui compte beaucoup dans une région comme la nôtre, sera au ralenti.

« Nous allons vers une nouvelle façon de pratiquer nos métiers, avec une typologie de clientèle différente, des méthodes de travail différentes, des offres nouvelles. »

« J’espère que nous ne serons pas amenés à supprimer quelques postes, la question sanitaire va encore jouer un rôle important dans ce domaine, redoute Patrick Jacquier. D’autant que nous allons vers une nouvelle façon de pratiquer nos métiers, avec une typologie de clientèle différente, des méthodes de travail différentes, des offres nouvelles ». Et beaucoup de convivialité à restaurer, de communication à distiller avec justesse et anticipation. Le tourisme, même s’il redevient principalement intrarégional, « nourrit les rêves de tout le monde ». Pour ambitionner plus, il faudra attendre que les avions se remettent à voler comme avant et qu’un Pasteur de la planète trouve le vaccin idéal.

« Il faut savoir regarder les choses du bon côté, nous avons la chance d’être dans un pays riche de patrimoine, il faut que tout soit mis en œuvre pour communiquer sur le tourisme local, plaide Patrick Jacquier. Nous avons un véritable réservoir de clientèle dans notre proximité. » C’est un bon point de vue, que DijonBeaune.fr partage depuis longtemps. S’il pouvait s’accompagner d’une démocratisation des vins de bourgogne en Côte-d’Or, quitte à ce qu’elle soit motivée d’une manière ou d’une autre, ce serait même un formidable retour en grâce pour la Bourgogne. Mais ceci est déjà le début d’une autre histoire…