9 anecdotes sur la Vente des vins de Beaune par Albéric Bichot

Présent sous la halle depuis 1990, Albéric Bichot est l’acheteur n°1 de la Vente et l’un des connaisseurs les plus intimes des vins des Hospices de Beaune. Le dirigeant de la maison de vins familiale a une âme plus littéraire que scientifique. Il livre ainsi son glossaire à lui : quelques mots parfois improbables mais toujours reliés à l’événement de sa vie.

Albéric Bichot est le premier acheteur de la Vente des vins des Hospices de Beaune. © Robin Jafflin / DijonBeaune.fr

Neige

Tous les Beaunois des années 60 et 70 ou presque sont nés aux Hospices. C’était le 29 décembre 1964 me concernant et il y avait, parait-il, 40 cm de neige dans les rues. Mon père me le rappelle à chaque anniversaire : « Tu te rends compte, je portais ta mère tellement il y avait de la neige ! »

Férié

Bien avant de lancer une enchère en 1990, j’ai dû vivre ma première vente à 11 ou 12 ans, dans les pas de mon père (ndlr, Bernard Bichot, millésime 1932 et issu de la cinquième génération, aux manettes de l’entreprise familiale durant quarante ans). Nous étions déjà sous les halles. Je me souviens que dans les années 70, le lundi qui suivait la vente, il n’y avait pas école à Beaune ! Ce jour était férié.

Lino Ventura, président de la Vente des vins des Hospices de Beaune en 1978. © DR

Président(e)

Les anciens parlent souvent de Lino Ventura (1978, en photo) ou Rostropovich (1984). Difficile à dire tant chaque président a apporté sa touche, avec plus ou moins de succès. Plus proche de nous, je me souviens du plaidoyer de la journaliste Tina Kieffer (2014). Avec son cœur, comme toujours dans ces circonstances, elle avait raconté le travail de l’association Toutes à l’École qu’elle avait créée au Cambodge. Cet engagement et cette humanité sont touchants.

Hôpital

Depuis 25 ans, nous sommes l’acheteur principal de la vente. Mais ce n’est pas de la gloire, c’est une chance d’avoir un hôpital à Beaune. Si une maison de vins née ici ne se donne pas la peine de faire perdurer cela, qui le fera ? Sans la vente, l’hôpital ne serait peut-être plus là. Dans notre inconscient, c’est un peu une propriété collective.

Gandhi

Je reste marqué par une édition présidée par l’écrivain Dominique Lapierre (1990), venu défendre la cause d’un orphelinat en Inde. Il avait fait un tabac, tout le monde l’avait trouvé poignant quand il parlait de Gandhi et de Mère Teresa. Plus tard, il est devenu un ami de la famille. Le lundi d’après cette vente, le futur Charles III, à l’époque Prince de Galles, était venu visiter les Hospices incognito…

Avant chaque Vente des vins, Albéric Bichot se retrouve avec ses principaux acheteurs à l’hôtel Le Cep de Beaune. © DR

Diète

Fin novembre est une période sportive. Je me lève tôt le dimanche et, si le temps le permet, je vais marcher une heure. Vers 10 heures, direction l’Hôtel Le Cep, où je retrouve mes principaux acheteurs pour recueillir leurs dernières confessions (en photo ci-dessus) avant de déjeuner à Loiseau des Vignes. Ils me donnent leurs choix définitifs, on s’entend sur le nombre de pièces, les conditions, les prix à ne pas dépasser. À 14h30, je serai leur voix aux enchères. Je dois connaitre leurs moindres attentes. Vers 21h, après la bataille, on se remettra à table, bien plus détendus. On se mettra en ordre de marche pour la Paulée du lendemain. À partir de mardi, j’entame deux semaines de diète !

Pèlerinage

Les acheteurs vivent la Vente comme une initiation à la Bourgogne. On vient ici des quatre coins du monde. La première fois, ils veulent voir, comprendre, pourquoi ces tonneaux de vin, cet argent, cette charité, cette histoire… Après, ils reviennent forcément, comme un pèlerinage.

Quelques minutes avant la Vente des vins de Beaune, Albéric Bichot reçoit les dernières instructions de ses clients. © Iannis Giakoumopoulos / DBM

Recrutement

Nous avons un noyau dur de clients, celui des professionnels. Les particuliers eux abordent la vente différemment. Lorsqu’ils ont une ou deux pièces dans leurs caves, ils font une pause. Il faut donc renouveler sans cesse ce cercle d’acheteurs pour maintenir le cap. C’est un travail de toute l’année aux quatre coins du monde, mené par un réseau de correspondants, nos distributeurs, nos importateurs. Il faut garder le contact en permanence, et faire beaucoup de pédagogie.

Mobilisation

Dès le jeudi soir, la maison Albert Bichot (le siège boulevard Jacques Copeau est en photo ci-dessous) reçoit ses premiers clients. Au moins 35 personnes de notre équipe sont mobilisées durant tout le week-end. Le samedi après-midi, nous recevons 300 personnes au total. Nous leur faisons déguster le millésime, mais aussi des années plus anciennes. Toutes les équipes techniques sont sur le pont. C’est pour elles une belle occasion d’expliquer leurs métiers. 

© Flore Deronzier / Domaines Albert Bichot