Le sport au cœur de la stratégie marketing de la fromagerie Delin

Le lait, le territoire et le sport sont les mamelles de la stratégie marketing de la fromagerie Delin. Une trilogie intimement liée aux passions de son patron qui, contre vents et marées, poursuit son parcours impressionnant. La mascotte de la JDA, autant adulée que le sont les joueurs, peut en témoigner.

Sponsor de longue date de la JDA Dijon, amoureux de basket et grand soutien du sport en général, Philippe Delin tourne pour une fois le dos au terrain lors du match de Champions League opposant la JDA à Bonn (62-72). La mascotte Lapin et la brique de lait Côte-d’Or forment sa garde rapprochée ! © Franck Putigny / DBM

Ces dernières années n’ont pas épargné son activité. Dans la foulée d’un covid qui a enrhumé une grosse partie de l’économie mondiale, « je pensais avoir vécu le pire », s’étonne encore Philippe Delin. Mais la crise en Ukraine a sclérosé certains marchés et débouché sur une crise énergétique cinglante pour bon nombre d’outils de production. Surtout si on doit faire appel au froid pour produire. L’homme ne se laisse pas abattre pour autant. Il a de la ressource, il aime l’esprit de compétition.

Le lait c’est du sport !

D’ailleurs, il n’en démord pas, le sport demeure le meilleur des vecteurs de communication. Il y consacre, entre cash et échanges marchandises, 1 à 2 % de son chiffre d’affaires selon les années, lequel approche les 40 millions d’euros. On vous laisse faire les comptes. Avec une facilité qui pèse lourd dans la balance : les « dates courtes ». Le sportif aime le fromage, et dans la circulation du fromage, ces « dates courtes » désignent les produits encore consommables, mais plus assez pérennes pour emprunter les chemins de la distribution. Ça peut aider.

En Côte-d’Or, le foot, le hand, le rugby, le hockey et bien d’autres disciplines sont donc servies sur un plateau. Beaucoup d’associations aussi, dont les Restos du cœur, heureuses de pouvoir placer un brillat-savarin ou la fameuse boite aux trois fromages Delin dans leurs menus.  « Cela permet de goûter nos produits, il n’y a pas mieux pour se faire connaitre », souligne Philippe Delin. Au milieu de cette générosité spontanée, le basket dijonnais occupe le dessus du panier. « Il est dans mes valeurs », martèle l’ancien basketteur, très attaché à la notion de respect de l’arbitre et à l’élégance du combat sur le terrain. La JDA, au-delà de la passion qu’elle anime en lui, a permis de donner un sens commun à ses stratégies de production et de communication.

Ce qui ramène à une croustillante anecdote… Le jour de l’inauguration de l’imposante unité de production de Gilly-lès-Citeaux, il y a une dizaine d’années, le fromager présentait son tout nouveau logo et annonçait son intention de produire massivement du lait sous son nom. Certains se souviennent encore des bougonneries publiques du père de Philippe, le grand Jacques, fondateur de la fromagerie, face à ce logo qui bousculait ses habitudes et à ce lait « qui ne rapportera pas un centime, nom de nom ! ».
Il n’avait pas totalement tort sur ce deuxième point, le paternel. Le fils en convient, mais y répond dans le détail : « J’avais en tête le logo de Roquefort Société. Le nôtre devait se voir de plus loin ; dans un magasin l’acte d’achat est spontané. Quant au lait, il est vrai qu’on investit beaucoup pour peu de marge, mais cela règle déjà nos problèmes d’approvisionnement en matières grasses qu’on récupère sur des briques qui partent allégées sur les marchés.  » Surtout, ce lait est source de grande visibilité.

La brique communicante

Une chose en entrainant une autre, la spirale laitière est en effet devenue elle-même un énorme support de communication. La départementalisation du lait (Lait de Côte-d’Or ou du Doubs par exemple), dont Delin s’est fait une spécialité, renforce la puissance du marketing territorial tout en favorisant le circuit court. Elle permet aussi de valoriser tout un ensemble de producteurs, dont le portrait couvre sans complexe l’emballage. Un QR code renvoie même à des vidéos de présentation très instructives à regarder. Ce n’est pas L’amour est dans le pré, certes, mais cela peut initier agréablement le consommateur à la réalité d’une exploitation.

En ces temps de débâcle pour eux, nos agriculteurs apprécient une telle mise en avant doublée d’une politique stable de prix à la source. Même si cette dernière peut parfois mettre en difficulté le fromager. Acheté 496 euros (hors taxe) la tonne, le lait peut ainsi varier de 300 euros à la revente à 600 euros en temps normal. « La crise de l’Ukraine, en 2022, est tombée au pire des moments, avec une montée des prix de l’emballage et la flambée des coûts de l’énergie, rappelle le chef d’entreprise. Nous étions au même moment en pleine montée en puissance dans la signature de contrats de cinq ans avec les agriculteurs, et donc face à des excédents de production à supporter », explique Philippe Delin.

3 millions de litres, une goutte d’eau

En une bonne dizaine d’années, la fromagerie Delin est malgré tout passée de 8 à 20 millions de litres collectés chez les producteurs laitiers. La cote des laits départementalisés ne cesse de grimper, passant la barre des 3 millions de litres conditionnés pour tendre vers un objectif de 10 à 15 millions dans les deux années à venir. Cela semble beaucoup, mais finalement une goutte d’eau au regard d’une production régionale qui approche 1,7 milliard de litres dont plus de 75% rien que pour l’ancienne Franche-Comté, grosse productrice de fromages.

Au palais des sports, Delin peut ainsi s’offrir les services d’une mascottebrique, qui marque les esprits partout où elle fait le show, à la JDA comme dans certains festivals. « Tout le monde se prend en photo avec elle », s’amuse Philippe. À l’image de Flore, la vache 100% Côte-d’Or, ces mascottes sont bien plus que l’évolution drolatique de l’homme-sandwich. Elles véhiculent un message sympathique qui développe la côte d’amour du public pour la fromagerie. Le lait, il est vrai, c’est du sport !