Aéroports bourguignons, décollage immédiat ?

Alors que l’aéroport Dole-Jura atteint le plafond de ses moyens et que celui de Dijon semble cloué au sol depuis le départ de la BA102, l’avenir aérien de la région demeure dans l’attente de décisions politiques claires. En pro de l’aviation, Jean-Jacques Berto, qui dirige le site dolois après être passé par celui de Dijon-Longvic, balaie le champ des possibles.

Au nom de la qualité de service aéroportuaire dans la grande région, Jean-Jacques Berto s’inquiète de cette situation d’entre-deux qui existe aujourd’hui entre Dole et Dijon.

Par Geoffroy Morhain
Pour Dijon-Beaune Mag #70
Photos Jonas Jacquel

Quel serait, selon vous, le scénario idéal à moyen terme en matière d’infrastructures aéroportuaires régionales ?
Seule région française à ne compter qu’un seul aéroport commercial, la Bourgogne-Franche-Comté est pour l’instant en bout de piste et doit absolument faire le nécessaire pour développer un site viable durablement. Aujourd’hui, l’aéroport Dole-Jura, qui reçoit déjà plus de 100 000 passagers par an et est le seul de la région à posséder toutes les certifications nécessaires vis-à-vis de l’Aviation civile, de la Gendarmerie, du Contrôle aérien ou des Douanes, apparait de fait comme le candidat le mieux placé. Situé à une trentaine de minutes de Dijon et de Besançon, beaucoup moins soumis aux problèmes de nuisances sonores que son homologue dijonnais, le site de Dole a tous les atouts pour devenir le futur grand aéroport commercial dont la région a besoin. Il ne lui manque qu’un nouvel aérogare de départ et une vraie volonté politique pour pouvoir rapidement prendre une altitude de croisière aux environs de 250 000 passagers par an. En liaison avec un « hub » (ndlr, plateforme de correspondance) international comme Amsterdam ou Munich, Dole pourrait alors devenir une véritable plaque aérienne semi-tournante qui donnerait aux habitants de la région une alternative aux gros aéroports comme Lyon (10 millions de passagers) et Bâle (7 millions de passagers), souvent synonymes de perte de temps.

Cela signifierait la mort pure et simple de l’aéroport de Dijon, qui semble pourtant reprendre des vols commerciaux depuis peu ?
Non, les deux aéroports peuvent facilement coexister de façon complémentaire sous réserve d’une vraie volonté de collaboration. Vu la situation actuelle, le site dijonnais pourrait se concentrer sur les vols privés, sachant que ce ne sont pas quelques charters affrétés ponctuellement par des agences de voyage ou des organismes publics qui vont lui permettre d’exister dans le temps. D’autant que l’Armée de l’air, qui faisait tourner la plateforme dijonnaise, est partie en emportant avec elle un certain nombre d’équipements et de services, d’aide à l’atterrissage entre autres. La société Edeis, en charge de l’exploitation de l’aéroport de Dijon depuis 2017, dit elle-même vouloir « développer la plateforme à travers trois grands axes : le service public avec les vols sanitaires, l’aviation d’affaires et la gestion immobilière ».

Au contraire, quel serait le scénario catastrophe ?
Le pire serait de faire durer la situation d’entre-deux qui existe aujourd’hui, au risque de n’avoir plus rien, sinon un aérodrome a minima, avec une douzaine de charters, 2 000 passagers par an, et une dégradation inexorable des services aéroportuaires à la clé. Il faut savoir que si l’on ferme Dole, on ne rouvrira pas un aéroport commercial à Dijon pour autant. Et que le Département du Jura doit renouveler en 2019 la délégation de service public de l’exploitant de l’aéroport de Dole qui arrive à son terme. L’occasion ou jamais pour la Région Bourgogne-Franche-Comté de prendre la main sur l’avenir du site dolois. À ne pas vouloir choisir, on risque de tout perdre…

Quels sont les « petits » aéroports provinciaux qui pourraient nous servir d’exemple ?
Si une douzaine de sites aéroportuaires ont fermé en France ces dernières années, d’autres sortent très bien leur épingle du jeu. Avec respectivement 300 000 et 240 000 passagers par an, des villes comme Bergerac, pourtant pas très loin de Bordeaux, ou Metz, proche du Luxembourg, sont la preuve que le transport aérien a un avenir hors des métropoles majeures de l’Hexagone. 


Jean-Jacques Berto en quelques dates

1987-1992 : contrôleur trafic aérien à l’Armée de l’air (Mont-de-Marsan)
1994-2001: agent d’opérations aériennes chez TAT Airlines (Marseille)
2003-2007 : coordinateur logistique chez Europe Airpost (Roissy)
2007-2013 : chef d’exploitation de l’aéroport Dijon-Bourgogne
Depuis avril 2013 : directeur de l’aéroport Dole-Jura