Benoit Charbonnaud, dénicheur de vieux millésimes et faiseur de rhum bourguignon

Hospicesdebourgogne.com célèbre vos meilleures années sans modération. Vignerons issus de la reconversion et surprenants producteurs de rhum à Rully, en Saône-et-Loire, Sylvie et Benoit Charbonnaud sont aussi des dénicheurs de vieux millésimes. Du fond des caves vient alors la grande émotion.

Benoit Charbonnaud s’est fait un spécialité de dénicher des vieux millésimes. ©D.R.

Benoit Charbonnaud a longtemps exercé dans le domaine de la grande distribution avant de créer son domaine viticole à Rully. Ses côtes-chalonnaises sont désormais reconnaissables entre tous, par la présence sur l’étiquette d’un bateau voguant toutes voiles dehors. Rien d’incongru en réalité. Cette autre passion pour les grandes traversées maritimes l’a mené jusqu’aux rives martiniquaises pour en importer du rhum, l’affiner en haute mer avant de l’élever en Bourgogne et le vendre au public dans des flacons finement dessinés.

Benoit, pas la peine d’en rajouter, sort des sentiers battus. En 2005, il commence ainsi à glaner, ici et là, des vins des cinq hospices de notre grande région viticole (Beaune, Nuits, Dijon, Beaujeu et Romanèche-Thorins), pour s’en faire une spécialité commerciale en ligne, sous le nom de hospicesdebourgogne.com. Finement joué. C’est de cette façon qu’il s’est découvert un nouveau « vice », mettant le nez dans les vieux millésimes : « Je me suis mis à acheter des caves entières, avec le sentiment sublime de fouiller dans ces trésors enfouis comme on fouille dans le sac à main d’une femme ! » Oups, ça c’est dit !

Outre leur passion pour les vieux millésimes, Benoit et Sylvie Charbonnaud sont aussi d’étonnants éleveurs de rhum à Rully (71). © D.R.

55, frais comme un gardon

Ces caves se retrouvent sur le marché pour des raisons diverses. Le plus souvent, suite à la disparition d’un être dont les héritiers ne sont pas armés pour les « liquider » ou les conserver dans de bonnes conditions. « Rien n’est plus personnel qu’une cave, elle montre quand la fortune a souri ou pas à son propriétaire, quels sont les meilleurs moments de son existence, les moments où il a eu le plus de moyens pour acheter, l’évolution de ses goûts. » Quand il pénètre sous les voûtes sacrées, l’aventurier de la cave perdue identifie non seulement la valeur de ce qu’il découvre, il pénètre l’intimité d’un(e) amateur(e) de vins.

Pas question alors de jouer aux épiciers. « Généralement, je fais une estimation globale et je prends tout ! » Benoit et son épouse Sylvie ventilent ensuite les flacons, qui pour la vente en ligne, qui pour des collectionneurs d’étiquettes, qui pour la décoration des restaurants, qui pour des dégustations dédiées au vieillissement des vins.

Dans ce domaine, certitude n’est pas loi. Les surprises sont souvent au rendez-vous. À l’image de cet aligoté 1955 de chez Robert Ampeau à Meursault, que nous avons eu le privilège de déguster, aussi frais qu’un gardon, avec une matière qui a de quoi faire rougir certains meursaults. Ou de ce simple bourgogne pinot noir des années 60 (l’étiquette est illisible), de chez Geisweiller & Fils à Nuits-Saint-Georges (domaine repris dans les années 90 par la maison Picard à Chagny) étonnant de vivacité, d’arômes et de longueur. C’est comme dans vie : le jeune va plus vite, mais l’ancien connaît le chemin.

Un bourgogne d’après-guerre de la maison beaunoise Albert Brénot, un des nombreux vieux millésimes abrités par Benoit Charbonnaud. ©D.R.

11 euros le saint-émilion 1916

Le mystère du vin vieux est impénétrable. Benoit en fait le constat chaque fois qu’il pratique l’archéologie bachique, achetant 8 à 10 caves par an. La réputation est acquise, « les gens nous appellent maintenant ». Du Nord, de Bretagne ou de Belgique souvent. En Bourgogne, il croise plutôt des domaines qui arrêtent leur activité sans passer la main. « Je ne me déplace pas en dessous de 100 bouteilles », explique modestement celui qui, aujourd’hui, a constitué un stock de 12000 bouteilles anciennes. Avec, parfois, de belles surprises à la clé. Un vigneron avait ainsi muré ses « TPMG »* pour les planquer. Mises au jour, il a fallu les sortir par un soupirail, les extraire en pleine rue, avec moult précautions et l’obligation de les ré-étiqueter, comme cela arrive régulièrement.

Les opportunités de trouver la perle rare sont diverses. Il y eut ainsi cette bouteille de Saint-Émilion 1916, repérée en amont d’une vente aux enchères à Bourg-en-Bresse. L’événement, dominé par d’autres offres que le vin, n’avait pas attiré les connaisseurs. Ne sachant pas trop sur quel pied danser, le commissaire-priseur fixe les enchères à 10 euros. Pas fou, notre Harisson Ford des vieux flacons emporte le morceau pour… 11 euros.
Des anecdotes de ce genre, il en a d’autres. Dont ce jour où il a fallu faire de la place dans la grande œnothèque de Wolfberger en Alsace. Ou celui où il a récupéré un stock de flacons couvrant 35 millésimes bordelais du Château Tour Vachon, patiemment acquis, année après année, par un Parisien sur la foire agricole de Saint-Denis. Des petites histoires qui se fixeront inconsciemment sur votre palais au moment de la dégustation.


* TPMG ou « Tout Pour Ma Gueule » dans le langage populaire. Généralement, ça n’est pas le plus mauvais !

Pour trouver des vieux millésimes : hospicesdebourgogne.com.
Vins et rhums du domaine Charbonnaud : charbonnaud.com.