Dijon : l’ambitieuse réhabilitation du foyer de la Trémouille par Orvitis

À Dijon, l’office public de l’habitat départemental conduit un de ses projets les plus ambitieux. En 2025, l’ancien foyer des jeunes travailleuses changera de visage et d’usage. Pour Orvitis, rénover du patrimoine ancien tient autant de la nécessité que du défi.

Orvitis réhabilite un bâtiment des années 1950 de six étages, boulevard de la Trémouille à Dijon. © Arnaud Morel / DBM

La façade, austère et régulière, est masquée par les platanes du boulevard de la Trémouille. Un vaste porche métallique, percé d’une discrète porte double, ouvre l’accès à ce qui fut, depuis 1954, le foyer des jeunes travailleuses de Dijon. Orvitis conduit ici son plus ambitieux projet à ce jour : réhabiliter et transformer l’édifice de 6 étages, ainsi que deux maisons plus anciennes accolées, pour faire place à une résidence pour séniors, des logements pour étudiants et jeunes actifs, et 320 m2 de bureaux.

À l’arrêt depuis 2020, le foyer, propriété de la Société des Filles du Cœur de Marie, a été repris par l’office en 2022. Ce dernier n’est pas propriétaire des lieux, mais bénéficie d’un bail emphytéotique de 40 ans. « L’association qui gérait le foyer a vu dans notre projet un moyen de poursuivre la vocation sociale de ces lieux », précise François-Xavier Dugourd, président d’Orvitis et vice-président du Conseil départemental.

Un enjeu technique…

Les études techniques préalables, conduites pendant près de deux ans, mettent en exergue l’une des difficultés des rénovations patrimoniales. « Nous avons réalisé de nombreux carottages qui ont révélé la présence d’amiante, de peintures au plomb et de mâchefers, ainsi que quelques autres surprises qui renchérissent les coûts et la durée de dépollution », détaille Sandrine Boyer, directrice technique chez Orvitis. Le budget global de l’opération s’établit autour de 7,5 millions d’euros, en intégrant ces phases de diagnostic et de dépollution préalables. L’autre problématique de cet important chantier tient à son accessibilité, complexe en cœur de ville. L’enlèvement des gravats, surtout, risque d’être « sport », le bâtiment étant situé en plein secteur sauvegardé, à l’immédiate proximité de la ligne de tramway et… des locaux de la Banque de France. « Nous allons déplacer la station de vélos Divia et songeons à ménager une entrée provisoire, dans le bâtiment ancien qui jouxte l’immeuble de 1954. Si nous optons pour cette solution, nous allons déconstruire, puis reconstruire à l’identique, selon les préconisations de l’architecte des bâtiments de France », poursuit la directrice technique.

Heureusement, le bâti s’avère de qualité, avec des murs épais, permettant d’envisager de bonnes performances énergétiques à l’issue de l’opération. Toutes les huisseries seront changées, et certaines zones bénéficieront d’une isolation renforcée, notamment au niveau du 6e et dernier étage. La vue sur Dijon y est exceptionnelle. 

… et social

C’est là qu’Orvitis va installer deux appartements T4 en « colocation intergénérationnelle » de 70 à 80 m2. Un salon et une cuisine communs permettent l’association d’une génération à l’autre. « Nous expérimentons ce concept, en lien avec une association qui se charge d’associer un sénior de plus de 65 ans, avec une personne plus jeune. Un moyen de rompre l’isolement des personnes âgées, voire de développer l’entraide, par exemple en leur faisant des courses », témoigne Fabien Lamy, directeur de la communication d’Orvitis. 

L’essentiel du bâtiment de 1954 abrite la résidence Sérénitis de 21 logements, essentiellement des T2/T3. Au rez-de-chaussée, un espace commun abritera les activités collectives, chaque résident bénéficiant dans son appartement de la plus parfaite indépendance. « Nous proposerons des activités collectives, en partenariat avec des associations, et d’autres services à la carte », détaille le bailleur. Les résidents pourront accéder à un très joli jardin d’environ 150 m2.

Sur la rue du Suzon, deux maisons du XIXe siècle jouxtent le bâtiment de 6 étages et délimitent deux petites cours intérieures. La première maison accueillera 19 logements « LOCIZY » pensés pour les étudiants : meublés, sans frais d’agence ou de caution, avec les charges comprises dans un loyer modéré. La seconde maison sera dévolue à 6 appartements plus vastes, destinés aux jeunes actifs. La mixité d’usages est le cœur du projet du bailleur. Le chantier entrera en phase opérationnelle d’ici la fin de l’année et devrait durer jusqu’à la fin 2025.

Rénovation « in vitraux » 

Le foyer des jeunes travailleuses a été édifié par la congrégation féminine des « Filles du Cœur de Marie », fondée en 1790 pour résister à la sécularisation révolutionnaire et prendre en charge les jeunes filles de la campagne attirées par les villes et leurs « dangers moraux ». Au plus fort de son développement, 300 jeunes femmes étaient accueillies, peu importe leur confession. 700 repas pouvaient être servis chaque jour. Le principal témoignage de cette vocation religieuse, une série de vitraux situés dans une ancienne chapelle, sera conservé et réutilisé. Trois d’entre eux sont religieux, avec des extraits des évangiles, tandis que sept autres témoignent d’une époque heureusement révolue et listent les métiers potentiels des jeunes filles. « Ils retracent fidèlement les métiers des années 50. Avec les machines à écrire pour la secrétaire, à calculer pour la comptable, à coudre pour la couturière, le fer à repasser de la blanchisseuse… Sont aussi présentes la poste, une nurserie, une pharmacie distincte d’une apothicairerie et la télémécanique (spécifique à Dijon) », explique Marie-Josèphe Verduron, représentant la congrégation des Filles du Cœur de Marie. La préservation de cette curiosité durant les travaux n’est pas le moindre des défis. Au-delà des vitraux, le chantier s’inscrit dans une logique de réemploi des matériaux présents sur place. « Nous avons expertisé tous les équipements et les matériaux présents dans les bâtiments. Nous allons réemployer certaines portes, des éléments sanitaires, des matériaux afin de limiter l’impact environnemental de la rénovation », détaille Sandrine Boyer, directrice technique chez Orvitis.