Directeur pince-sans-rire du château du Clos de Vougeot le jour, écrivain à la formule courte et aux mondes larges la nuit, Richard Fussner persiste et signe dans cette identité double. Mieux : il récidive…

Dans le petit théâtre du vin en Bourgogne, il tient un rôle sérieux. Costume assorti à la courtoisie, sens de l’accueil et manières impeccables : le directeur du château du Clos de Vougeot est, depuis dix-sept ans, à la hauteur de ce temple de l’excellence bourguignonne. Tel est « monsieur Fussner ».
Ce Savoyard a quitté les rives d’Annecy pour apprendre l’hôtellerie à Toulouse avant de faire carrière chez les Helvètes, en tant que chef sommelier à l’Hôtel Beau-Rivage de Genève. Une trajectoire solide, marquée du sceau de la rigueur et de l’attention à l’autre, avant de rejoindre les vénérables pierres cisterciennes. En 2021, il a pris de court tout son monde, même ceux qui pensaient le connaître, en publiant aux éditions du Sékoya Le Petit Fussner, dictionnaire « futile et cependant indispensable » montrant déjà un certain sens du baroque. Une réussite, récompensée du Prix René de Obaldia.
Un deuxième livre en 2024
Fin 2024, rebelote avec Miscellanées, bien nommé recueil de « 72 instants volés au quotidien, déclinés entre rire et mélancolie à la première personne ». Du Fussner dans le texte, toujours avec ce goût du rythme et du clin d’œil, sans esbroufe, pouvant rappeler le verbe contemplatif d’un Jean-Loup Dabadie. De quoi soulever un peu plus le voile d’un auteur pince-sans-rire, fin observateur de la vie et des gens, amoureux des mots et des détours de l’esprit. Tel est « docteur Richard ».
« Par sa bizarre idée du jour ou sa folie d’un instant, il vous guide vers un autre souvenir, un autre éclat de rire ou une autre larme », se régale l’écrivain Xavier Jaillard au sujet de son confrère de l’académie Alphonse Allais, dont il partage l’adoration pour Romain Gary. Il y a en effet de l’inspiration dans cette écriture en kaléidoscope, et peut-être même, en cherchant dans les coins, un talent certain.
« Du fait de mes activités, je suis condamné à la forme courte », évacue poliment le premier concerné. Son prochain livre, Récidives, promet de prolonger ce jeu de miroirs entre le grave et le frivole. Un titre à double fond, bien sûr. Récidiver, c’est persister dans la faute, mais aussi revendiquer le plaisir de recommencer. L’homme concède de toute façon « une nature besogneuse et le besoin, presque physique, d’écrire ». Les lecteurs sont au rendez-vous. Bondir d’une histoire à une autre provoque alors en nous le sentiment grisant d’une combustion lente : on croit simplement sourire ; on s’enivre. D’où l’envie de récidiver.



