Maison Henri Gouges : un virage œnotouristique réussi

Un an et demi après son ouverture, la Maison Henri Gouges démontre que l’accessibilité aux vins d’un grand domaine, tout au long de l’année, est possible à Nuits-Saint-Georges. Grégory et Antoine ne s’arrêtent pas en si bon chemin. Ils vont donner un peu de renfort à Viviana Jaimon, responsable du site, la plus bourguignonne des Argentines…

Antoine et Grégory Gouges misent sur leur « maison » pour proposer leurs vins à la dégustation en toute saison. Experte en dégustation et polyglotte, Viviana Jaimon est la précieuse gardienne des lieux.
©Antoine Martel/DBM

Chez Gouges, c’est inscrit dans les gênes, Henri demeure à jamais le phare de toute action. Dans la première moitié du vingtième siècle, l’emblématique aïeul fit tant de bien aux vins de Bourgogne, qu’il contribua à l’avènement des appellations contrôlées, celle de Nuits-Saint-Georges en premier lieu. Ce pionnier de la viticulture de terroir avait l’instinct des grands.

Ses arrière-petits-enfants Grégory et Antoine gèrent aujourd’hui le domaine familial. Les deux cousins associent intimement le devoir de mémoire au devoir de partage. Car le vin, est-il bien nécessaire de le rappeler, n’est pas un produit comme les autres. Issu de grands terroirs comme La Perrière côté blanc, ou Les Vaucrains et Les Saint-Georges côté rouge, il met ses serviteurs face à un défi exigeant : viser en premier lieu la finesse, le soyeux, la tendresse et l’esprit de garde.

Dans la droite ligne de la diversité de commercialisation qu’ils entretiennent, les deux cousins ont fait le serment d’une large accessibilité. Dans le contexte d’une Bourgogne qui, notamment en Côte de Nuits, a tendance à s’envoler (tout comme ses prix) vers les destinations lointaines, c’est méritant.

Une maison dans le domaine

La Maison Henri Gouges, freinée au départ par le Covid, est désormais le projet qui exprime le mieux cette volonté. Elle n’a rien d’un caveau, on vous l’expliquera sur place, mais elle traduit cette volonté de s’ouvrir au plus large public.

Au quotidien, Grégory et Antoine s’appuient sur la passion de la plus bourguignonne des Argentines. Viviana Jaimon est la cheville ouvrière de ce lieu créé dans l’enceinte même du domaine, durant l’été 2023. Cette « maison dans la maison » propose un voyage 100% nuiton, via quatre dégustations savamment étudiées, ouverte à une vingtaine de personnes au maximum, sur rendez-vous ou bien à l’improviste. De 20 à 75 euros, l’accessibilité est donc bien là. Une douzaine de vins balaient la grandeur du terroir nuiton.

Parmi eux, le magique premier cru Les Saint-Georges, promis au statut de grand cru. Dire qu’à une autre époque, ce bon vieux Henri, qui en avait pourtant la possibilité, ne souhaita pas favoriser ce classement pour ne pas être suspecté de favoritisme ! Ce ne serait pourtant qu’un juste retour des choses.

©Baptiste Paquot/DBM

L’accessibilité comme mot d’ordre

« Ces dégustations sont pensées comme des histoires, on aurait dû faire cela depuis longtemps. » Un an et demi après l’ouverture, Grégory apprécie le verre à moitié plein de cette belle expérience, tout en tirant certaines conclusions : « Au départ, nous avions raisonné sur un découpage en trois tiers de visiteurs, le tourisme de proximité (Français, Bourguignons…), nos allocataires et le secteur VIP à l’international. » Ces derniers, poussés par l’action au quotidien de Viviana et un marché porteur, fonctionnent bien. Tant mieux, tant ils constituent le socle économique d’un domaine bourguignon de renom. « Viviana recevra bientôt du renfort, poursuit toutefois le vigneron, car nous voulons maintenir notre effort sur le local, même si cette clientèle ne se fidélise pas facilement ».

La question du pouvoir d’achat traine toujours un peu au fond de la bouteille. Mais pas seulement. Alors qu’ils pourraient se contenter de surfer sur les marchés captifs de commercialisation de leur domaine de quinze hectares (avec un peu de négoce pour ajuster l’offre), Grégory et Antoine Gouges mettent en pratique ce mot d’ordre qu’ils placent au-dessus de tous les autres : « l’accessibilité ».

Le virage œnotouristique que prend plus globalement Nuits-Saint-Georges, comme en témoigne par ailleurs notre échange avec les vignerons de l’appellation semble leur donner raison. Allez donc faire un tour chez Maison Henri Gouges – y compris en pleines vendanges – vous en aurez vous-même la conviction : déguster un grand nuits c’est possible, et ça ouvre les chakras sur les nombreuses subtilités de la Bourgogne.

👉 Maison Henri Gouges, 7 rue du Moulin à Nuits-Saint-Georges – 03 80 61 04 40 – gouges.com[email protected] – Lundi (14h-18h), du mardi au samedi
(10h-13h / 14h-18h). Fermé le dimanche.