Mangez comme à l’époque au Restaurant de la Porte Guillaume à Dijon : 1907 et l’œuf bénédictine

Quatre générations de Frachot moustachus se sont succédées à la tête du Restaurant de la Porte Guillaume, place Darcy. DBM et DijonBeaune.fr redécouvrent quelques plats servis à chacune des époques leur correspondant. Premier épisode : 1907. À Dijon, sous l’ère de « François premier », on mange des œufs pochés à la bénédictine et du pigeon farci façon Lucullus !

Porte Guillaume : tout le mois de mars, allez-y de notre part !
L’Hôtel du Nord est né en 1855. La famille Frachot reprend l’établissement en 1907. Après François, il y aura Alfred (1920), Henri (1939) puis Dominik (1977) qui, cette année, a décidé de le rebaptiser Hôtel Darcy pour mieux le référencer sur le net. En revanche, le restaurant porte toujours le nom de la Porte Guillaume, en référence à Guillaume de Volpiano alias Guillaume de Cluny, abbé de Saint-Bénigne. En partenariat avec DBM et DijonBeaune.fr, Dominik Frachot propose de servir au Restaurant de la Porte Guillaume durant le mois de mars, les deux plats présentés dans cet épisode n°1. Si vous voulez manger comme à l’époque, c’est le moment ou jamais. Et faites-nous savoir ce que vous en pensez !
Restaurant de la Porte Guillaume, place Darcy à Dijon – 03.80.50.80.50.
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Dijon est en pleine mutation. Les omnibus tractés par les chevaux cèdent leur place aux tramways électriques. La révolution de la mobilité est déjà en marche. Nous sommes au tout début du XXe siècle. La capitale bourguignonne vient de recevoir la Légion d’honneur pour le courage que sa population a montré durant la guerre franco-allemande de 1870. Elle ne se doute pas encore que l’histoire, pourtant habituée à se répéter, va bientôt remettre le couvert et le couvercle sur bien des espérances.

En attendant, on a pris le temps de redessiner la ville, de lui donner des élans haussmanniens. Forte de son aura militaire, Dijon compte pas mal de casernes. Un ensemble de six forts a même été édifié. En trente ans, la ville a plus que doublé sa population. En 1907, année de l’arrivée de François Frachot à la tête de l’Hôtel du Nord, elle a largement dépassé le cap des 70 000 habitants.

Le Restaurant de la Porte Guillaume, place Darcy à Dijon. Toute une histoire ! © S.Rouillard / Kyonyx Photo

L’œuf poché pour sir Benedict

Le maire se nomme Henri Barabant, un fils de vigneron, régisseur et jardinier du château du Clos de Vougeot. Ce syndicaliste de la compagnie des Chemins de fer est un baron local du parti socialiste. Sa gouvernance est plutôt anticléricale. C’est lui qui, bien avant le chanoine Kir (1876-1968), fera du vin blanc associé au cassis, l’apéritif officiel local. Il ne gardera donc pas la paternité de son œuvre. Toujours se méfier des retours de soutane…

Ces kirs qui ne portent pas encore leur nom, on en sert chez François Frachot. L’ancien maître d’hôtel au Buffet de la Gare tient à cet art de vivre à la dijonnaise. Et parmi les plats en vue de la table qui rayonne sur la place Darcy, on trouve l’œuf poché bénédictine. Une recette très récente en réalité, sans rapport aucun avec l’ordre des Bénédictins. Qui viendrait des habitudes d’un certain Lemuel Benedict, client de l’hôtel Waldorf à New York. Œufs pochés, lard grillé, sauce hollandaise : telle est la base d’un mets de référence à servir au petit déjeuner comme au déjeuner. Avec un peu de bacon frit c’est encore meilleur.

De beaux œufs pochés, un peu de lard grillé, une sauce hollandaise qui vient napper le tout avant d’accueillir un peu de persil frais : les œufs bénédictines du Restaurant de la Porte Guillaume, ode à la simplicité. © Jean-Luc Petit

Roulement de topinambours

En ces temps bénis, on ne s’arrête pas à ce genre de mise en bouche. On en garde pour le pigeon farci à la Lucullus. Entendez farci au foie gras. Tout est question de maîtrise. En 2022, David Ardoint officie depuis douze ans dans les cuisines de la Porte Guillaume. Il se propose de refaire le plat pour DBM. Et se régale visiblement de pouvoir remonter le temps. Le volatile ne manque pas de classe, il est vrai. Il vient de chez Patrice Sanchez à Ladoix-Serrigny, l’incontestable « dealer » ou « leader » c’est selon, des pigeons sur la place côte-d’orienne.

Le jus est brun, juste comme il faut. Les topinambours à la crème apportent une douceur rassurante pour les intestins. Il se dit que ce tubercule, aux saveurs proches de l’artichaut, a même des vertus inestimables pour la prévention de certains cancers. Cumuler le bon et la santé, rien de tel.

Mais revenons à nos moutons. À l’année 1907. Dehors, la place Darcy est en ébullition. Des usines ont fleuri dans les faubourgs, le lycée Carnot et l’École Normale ont vu le jour. Dijon brille de promesses. Tout près de l’Hôtel du Nord, qui abrite le restaurant de la Porte Guillaume, de grands magasins ont vu le jour. Rue de la Liberté, il y a la célèbre « Ménagère ». Et si on y allait ? Pour y faire du shopping, histoire de digérer un peu ?

Le pigeon de l’éleveur Patrice Sanchez a été sacrifié pour la bonne cause. Le chef David Ardoint lui a collé contre la chair un peu de foie gras et accompagne le tout d’un beau jus brun. Les topinambours apportent une réponse tout en douceur. Mhhhh ! © Jean-Luc Petit