Irancy, perle rouge des vins de l’Yonne

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Ce week-end, Irancy accueille la grande Saint-Vincent tournante. Plusieurs dizaines de milliers de visiteurs sont attendus dans ce petit village de moins de 300 habitants. Mais au fait, connaissez-vous bien l’appellation?

Par Jacky Rigaux pour Bourgogne Magazine
Photos : D. R. sauf mention contraire

Jacky RIGAUX © Christian BON

Aujourd’hui dominé par la forte personnalité et le prestige du Chablis, le vignoble de l’Yonne, paradis des vins blancs, voit revenir sur le devant de la scène les appellations historiques qui bénéficiaient aussi d’une belle notoriété, avant que le phylloxéra ne les anéantisse. Dans ce contexte, irancy et ses 67 Climats s’impose comme le grand vignoble qui symbolise le retour à la lumière des grands vins rouges de l’Yonne.

Situé dans un amphithéâtre qui le protège des vents du nord et lui offre une exposition à l’ouest-sud-ouest, sur des marnes et des calcaires du Jurassique supérieur, Kimméridgien et Portlandien, le vignoble offre un terroir d’ élection pour le grand cépage rouge bourguignon, le pinot noir, et pour l’historique cépage rouge dénommé « césar », qui atteste son antique implantation.

Terroir singulier

Terroir d’ élection en Irancy pour les cépages rouges donc, et grand terroir bourguignon original pour ces derniers, car on n’a pas les mêmes expositions que sur les côtes bourguignonnes de Nuits, Beaune, Chalon ou Mâcon qui regardent l’ est, on n’ est pas sur le même type de calcaires, le Jurassique moyen y est plus présent en Côte-d’Or et Saône-et-Loire, on est à une latitude plus septentrionale et à une altitude un peu moins élevée, allant de 130 à 250 mètres.

Les vins de l’appellation Irancy peuvent ainsi afficher une originalité, une typicité, une personnalité bien singulière. Comme dans tous les grands terroirs bourguignons, cette originalité d’expression se décline en une diversité de « climats », ces parcelles soigneusement délimitées par les moines bénédictins, puis cisterciens, qui s’imposeront à la Renaissance comme la clé des grands vins de Bourgogne. Ainsi, pas moins de 67 climats constituent une mosaïque de parcelles qui peuvent révéler leur caractère unique, grâce ici à plus de pierrosité (aux « Cailles » ou à « La Comme »), là à un envers (« Envers du Val de Noyers » ou « Envers du Val Suzeau »), là encore par une exposition en haut de coteau (« Les Hauts de Charmois », « Le Haut du Val Suzeau », « Le Dessus du Vau Falleau », « Le Haut de Val de Noyers »)…

Bref, une diversité qui n’a rien à envier à celle que l’on trouve à Gevrey- Chambertin ou à Vosne-Romanée ! Et, comme dans ces vignobles, on y trouve des parcelles historiques de grande réputation, « La Palotte » en particulier qui avait jadis une réputation aussi grande que « Chambertin » ou « Romanée » ! Le vignoble s’étend sur les communes d’Irancy, Cravant et Vincelottes. Il dispose d’un potentiel de plus de 300 hectares, mais seulement un peu plus de 159 hectares étaient plantés en 2011, une soixantaine au début des années 2000 ! On est en présence d’un vignoble argilo-marno-calcaire de grande complexité, qui va offrir une gamme d’expression exceptionnelle au pinot noir et au césar.

Excellence et infinie diversité

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A la limite des communes d’Irancy et de Vincelotte, une grande partie du vignoble est installée sur un substrat jurassique coiffé par le lambeau résiduel d’une ancienne terrasse de l’Yonne. On y trouve des matériaux sablo-argileux, issus de l’érosion des granites du Morvan. Du coup, les vins de ce secteur ont tendance à être plus souples, légers et fruités que ceux qui proviennent de terrains à la densité de calcaires et d’argiles plus importante, comme du côté de Palotte… A l’amateur de redécouvrir l’infinie diversité de ce terroir d’excellence.

Si le cépage césar est encore présent en ce grand terroir à rouge, c’est parce que, malgré sa sensibilité aux gelées printanières, il a la singularité de produire des vins très colorés, très charpentés et de longue garde. Ainsi, en jouant sur l’expression unique du pinot, sur l’assemblage avec le césar ou encore sur l’utilisation unique du césar, on accentue l’originalité de ce terroir qui renaît après un long sommeil imposé par le désastre phylloxérique, mais aussi par le triomphe du chardonnay en Chablisien…

Quoi qu’il en soit, les vins rouges d’Irancy tirent l’œil par leur robe limpide, brillante, soutenue, au beau rubis serti de nuances pourpres dans leur jeunesse. Le nez offre toute la palette des parfums bourguignons, la bouche associe tendresse et consistance, avec tous les registres sensoriels nés de la diversité des terroirs : plus de vivacité pour certains vins, plus de minéralité pour d’autres, plus de souplesse ou plus de vigueur en certains climats, de la longueur toujours et de belles persistances aromatiques, des vins sapides…

Averti ou débutant, l’amateur trouvera en Irancy un terrain de jeu inépuisable. La diversité des crus d’Irancy, vins de gastronomie comme tous les grands bourgognes, en fait des compagnons prêts à toutes les audaces, en fonction de leur âge comme de leur lieu de naissance. A la bonne vôtre !

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