Accords mets et bières au Clos du Cèdre (Beaune) avec Brasserie de France

Ce nouvel épisode autour des accords bières et mets se joue sur le terrain du circuit court. Dans le cadre cossu du Clos du Cèdre, le chef étoilé Jordan Billan reçoit le brasseur Jean-Claude Balès pour une dégustation 100% beaunoise, 100% bonheur.

Nous sommes à Beaune, dans les jolis salons du Clos du Cèdre, où bière et vin sont cousins. Jean-Claude Balès, le cofondateur de Brasserie de France,  a fait les quelques kilomètres qui le séparaient de la cuisine juste et précise du jeune chef étoilé Jordan Billan. © Jean-Luc Petit / DBM

Cette fois, Jean-Claude Balès n’a pas pris la glacière. Trois petits kilomètres séparent Brasserie de France de l’Hostellerie Cèdre & Spa : les bières vont rester à bonne température. Le nouveau campus brassicole et l’un des plus chics établissements de Beaune étaient faits pour croiser leurs univers. À un jet de bouteille du centre-ville, l’hôtel cinq étoiles propose 40 chambres et suites douillettes ainsi qu’un restaurant gastronomique, Le Clos du Cèdre, installé dans une belle maison de maître du XIXe siècle. Avec sa terrasse-jardin propice aux dimanches alanguis et ses salons cossus, le cadre attire en majorité une clientèle habituée aux voyages et désireuse de découvrir un large éventail de charmes bourguignons.

Jordan Billan y contribue largement. Millésime 92, ce chef originaire de la région lyonnaise, fils d’hôteliers-restaurateurs, demeure fidèle à la maison depuis bientôt dix ans. De chef de partie, il est devenu un cuisinier sûr de son style, épaulé par une vingtaine de collaborateurs entre cuisine et service. Sa compagne et maître d’hôtel Gwëndoline Baton et l’expérimenté chef sommelier Benjamin Maillet forment sa garde rapprochée. La constance de cette jeune équipe soudée a été récompensée d’une étoile Michelin en 2022. La dynamique n’est pas prête de s’étioler, alors qu’arriveront prochainement une extension dédiée à la boulangerie et des cuisines flambant neuves.

© Jean-Luc Petit / DBM

🍺 La Beaunoise Hospices (9%)
🍽️ Carpaccio charolais

Ce carpaccio de bœuf beaunois a fière allure. Un peu de caviar l’emmène sur des rives iodées. Les pickles de légumes ajoutent un « kick » d’acidité bienvenu. La cazette du Morvan, cette noisette prisée des chefs bourguignons, apporte croquant et notes grillées. C’est justement cette trame torréfiée que Jordan Billan est allé chercher en sélectionnant La Beaunoise Hospices, une bière particulièrement généreuse. Son toucher de bouche, comme diraient les gourmets du vin, est en même temps très délicat. Orge et cannelle apportent la rondeur, blé et muscade la vivacité, sarrasin et clou de girofle le caractère. « Le parcours gustatif est plus long, il balance entre céréales et épices », résume avec gourmandise Jean-Claude, tout en prélevant une tranche de cette belle viande locale. Ça mâche et ça matche !

La concentration des goûts

Formé notamment auprès de Stéphane Derbord, le chef beaunois se tient à l’écart de toute esbroufe. Il revendique plutôt une nature perfectionniste et un attachement aux traditions jusqu’au bout de la toque (qu’il aime porter). « Je n’aime pas vraiment le concept de plat signature ; je préfère avoir une approche « produits » et concentrer leurs goûts », résume-t-il, dans son style tout en sobriété. Ses mentors lui ont appris que le talent d’un cuisinier se reconnait à ses sauces. Jordan fait volontiers réduire chartreuses, bières ou vodkas pour les transformer en exhausteurs de plats.

L’ambassadeur de la marque Savoir‑faire 100% Côte-d’Or prélève ainsi ses ingrédients dans un périmètre proche et place ses fournisseurs en tête de sa carte. Merci Amandine pour les fleurs, Patrice pour les pigeons, Gérard pour les truffes, Mathieu pour les jeunes pousses, Alain pour le fromage, etc. 

Le bœuf charolais que nous allons déguster en carpaccio est d’ailleurs élevé à quelques kilomètres des cuisines par Armand Heitz. Le vigneron-paysan de la Côte de Beaune partage avec Brasserie de France la même philosophie du circuit court (voir vidéo sur notre compte Instagram @dbm_le_mag). Les bêtes du premier sont nourries par les drêches, ces résidus du brassage des céréales, du second. Une gamme de bières élevées dans des fûts de Pommard, en édition très limitée, est même née de cette complicité. Elle fut d’ailleurs le coup de cœur du chef Yohann Chapuis lors de notre dernier épisode.

© Jean-Luc Petit / DBM

🍺 La Beaunoise Cassis (5%)
🍽️ Demi-pigeon rôti sur le coffre, tombée de blette, jus réduit à la moutarde 

Viandes et fruits rouges sont de fidèles compagnons. Cet accord rappelle le rôti aux airelles qu’on dépose sur la table à Noël. Le pigeon qui nous préoccupe a mené une existence idéale tout près de la colline de Corton, avant de finir rôti sur le coffre. Jordan Billan lui a fait honneur de la cuisse à l’aileron, et a même prélevé le filet et isolé les abats dans un cromesquis. Rien ne se perd ici, telle est la philosophie maison. La chair délicate du pigeon est relevée par un peu de moutarde au miel (beaunoise évidemment), d’ail noir et de framboise. « Cette bière au cassis, portée par l’acidité du fruit, va comme équilibrer ce sucré-salé », note le chef, séduit par la trame tout en subtilité de cette version Cassis. 

De la bière au vin

Les bières qui nous intéressent ce jour sont d’une autre nature. Cette rencontre beauno-beaunoise méritait bien La Beaunoise. Sept recettes composent cette gamme, suffisamment pour pouvoir voyager sereinement au pays des saveurs. Un carpaccio de bœuf, un demi-pigeon et un parfait glacé en ont donc fait les frais (lire encadrés). En bon dégustateur (il est régulièrement invité au château du Clos de Vougeot pour le Tastevinage), fruit d’un atavisme paternel, le chef du Clos du Cèdre goûte à la proposition sous la conduite bienveillante de Jean-Claude Balès. En matière d’accords bières et mets, il ne faut rien s’interdire, hormis ce qui va à l’encontre du bon sens : « Le mieux est de se débarrasser de ses idées reçues, de tester et d’oser. La palette aromatique des bières est tellement développée qu’il serait dommage de ne pas en profiter », commente le papa de Brasserie de France, expliquant à l’envi qu’un plat et une boisson peuvent s’entendre « sur trois modes : la résonance, le contraste ou la complémentarité ». Pour la photo et le plaisir, l’intéressé ira finalement piocher dans la carte du sommelier pour passer du houblon au pinot noir. Jamais à une originalité près, le brasseur veut rapprocher les univers du vin et de la bière. Nous sommes à Beaune, ne l’oublions pas…

© Jean-Luc Petit / DBM

🍺 La Beaunoise IPA (6%)
🍽️
Parfait glacé à la framboise, purée d’herbes et fruits secs
Au Clos du Cèdre, la fin de repas est l’affaire d’Ivona Geiger. La jeune cheffe pâtissière livre ici un parfait glacé parfaitement rafraîchissant. « Il nous arrive de le relever à la chartreuse », précise le cuisinier, qui convoque volontiers une petite purée d’herbes (basilic, ciboulette, persil) dans la recette. En face, on cherchera l’amertume délicate de La Beaunoise version IPA, un peu plus riche en houblon que ses cousines. Sa fraîcheur herbacée lave le palais. « Cette bière de fermentation haute, brassée avec des malts pâles peu torréfiés, est une affaire de puissance et de subtilité », résume son brasseur, qui recommande aussi sur ce type de dessert La Beaunoise Blanche, avec ses écorces d’orange et sa touche de coriandre.