Les petits secrets du crémant de Bourgogne : la vinification, un travail d’orfèvre

Le crémant de Bourgogne représente 10% de la production régionale. Son élaboration repose sur quelques subtilités que DBM et DijonBeaune.fr proposent de faire découvrir à travers une série sur ses métiers. L’intarissable Pierre du Couëdic, directeur de l’Union des producteurs et élaborateurs de crémant de Bourgogne (UPECB), ouvre le bal avant les fêtes concernant l’acte de vinification.

Pierre du Couëdic est un véritable passionné du crémant et de son histoire. De fait, il n’hésite pas à mouiller le maillot (et un peu les ourlets) pour défendre l’image de l’effervescent, comme ici place de la Libération à Dijon lors d’une dégustation estivale. © Michel Joly

Du travail dans les vignes à la vinification, quelles sont les grandes différences entre la production d’un vin tranquille et d’un effervescent ?
D’abord, on distingue deux grands métiers dans la filière du crémant : le producteur fait le travail de traitement de la vigne toute l’année comme tous les viticulteurs, et l’élaborateur qui assemble les cuvées, les élève puis les dégorge (ndlr, nous reviendrons sur ce terme spécifique). Côté production, il existe deux grandes différences entre vins tranquilles et crémants : la première est l’obligation de la vendange manuelle, pour la simple et bonne raison que la grappe doit arriver entière au pressoir. Cela réduit les chances d’oxydation, et le pressurage de grappes entières permet de séparer trois jus : le premier, le jus de cuvée, constitue la base du vin. Ensuite, suivant si le producteur souhaite un crémant de garde ou non, on peut ajouter ce qu’on appelle les jus de première taille et de deuxième taille.

Garder les grappes intactes demande une grande précaution au moment de vendanger…
Autre spécificité des vendanges, les raisins sont rangés dans de petites caisses percées pour éviter de trop les compresser. Je me souviens de vendanges à Rully, chez Louis Picamelot, où ils utilisaient des petites cagettes d’à peine 20 cm de profondeur, c’est dire ! D’ailleurs, on vendange toujours les raisins à crémant avant les autres, pour éviter les sucres trop élevés et conserver l’acidité qui donne cette fraicheur spécifique aux crémants de Bourgogne.

Après la production vient le moment de l’élaboration…
La première étape est l’assemblage. Elle intervient l’hiver suivant les vendanges et consiste à rendre homogène les différentes cuvées obtenues par les différents cépages. Je compare souvent cette tâche au métier de nez dans la parfumerie, qui prépare et teste les mélanges d’essences pour créer un parfum. L’élaboration du crémant demande la minutie d’un horloger. On met un peu de cette cuvée, un peu de celle-ci, et cela donne une signature maison. Il existe des multitudes de combinaisons possibles et imaginables : on peut même ajouter des cuvées plus vieilles pour aller chercher un certain arôme, c’est fascinant.

AOC depuis 1936 sous l’appellation Bourgogne mousseux puis crémant de Bourgogne en 1975, elle représente 10% de la production régionale. © Clément Bonvalot

Comment le vin devient-il effervescent ?
Après l’assemblage, le vin vieillit sur lattes, en position horizontale. Viendra la troisième et dernière étape avant dégustation : le dégorgement. Les bouteilles sont mises la tête en bas dans des bacs de congélation à -25° C. Au bout de quinze minutes un glaçon se forme dans le col de la bouteille, dans lequel est pris au piège la levure. Elle est extraite puis remplacée par la liqueur d’expédition qui ajoute la dose de sucre nécessaire pour créer un équilibre parfait avec l’acidité naturelle du vin.

Brut, sec, doux… On s’y perd parfois. À quoi correspondent ces mentions ?
Justement, ces mentions que l’on retrouve en bas des étiquettes dépendent de la teneur en sucre du vin. Il y en a sept pour le crémant de Bourgogne : brut nature (- de 3 g/L), extra-brut (entre 0 et 6 g/L), brut (- de 15 g/L), extra-sec (entre 12 et 20 g/L), sec (entre 17 et 35 g/L) et demi-sec (entre 33 et 50 g/L). Au bout du compte, on constate que la majorité des crémants de Bourgogne sont des bruts.

Nos cépages rois sont le pinot noir et le chardonnay. Lesquels peuvent composer un crémant de Bourgogne ? 
Certaines règles sont à respecter. Il y a d’abord les cépages de première catégorie, qui sont évidemment le pinot noir et le chardonnay. Chaque crémant doit être composé a minima d’un de ces deux cépages à hauteur de 30 %. Puis, suivant l’identité que l’élaborateur veut donner à son crémant, des cépages de deuxième catégorie sont à disposition : le gamay (20 % maximum), l’aligoté, le melon et le sacy. Pour les fêtes, ouvrez l’œil sur l’étiquette !