110 000 visiteurs aux 100 ans de la Foire de Dijon : quel bilan et quels enseignements ?

Le président de Congrexpo Jean Battault et sa directrice Nadine Bazin ont dressé un bilan à chaud de la 91e Foire de Dijon. Logiquement, moins de visiteurs pour ce centenaire replacé sous le signe de la gastronomie, mais de la satisfaction et quelques enseignements.

110 000 visiteurs à la louche, 450 exposants contre 530 habituellement, 30% de chiffre d’affaires en moins pour l’organisateur. Voilà pour les premières constatations d’usage. « Mieux que nos projections initiales et les autres foires nationales », martèle Jean Battault, tout en prenant soin de préciser que le score d’il y a deux ans (162 000 visiteurs) appartient à un autre monde. « Certaines comparaisons n’ont plus lieu d’être. L’événementiel a un nouveau référentiel. Tout ce qu’on a connu avant le Covid n’existe plus. »

Nadine Bazin, à la tête d’une équipe de 27 personnes, confirme. Et souligne de son côté l’effort collectif : « La foire, c’est habituellement 8 à 9 mois de préparation. Avec notre reprise en juin, cela nous a laissé à peine moitié moins de temps. De ce point de vue, c’est une réussite. » Il est vrai que sur les stands, quelques têtes bien connues étaient absentes. « Des exposants étaient frileux et on les comprend. Venir ici est un investissement financier mais aussi humain. » Certains ont donc renoncé, laissant leur place à des petits nouveaux bien contents de leur baptême. D’autres avaient carrément mis la clé sous la porte.

Plus de place, plus de confort

Dans tout cela, Congrexpo boit le verre à moitié plein. La foire a manqué à beaucoup. Cet esprit de retrouvailles a été fêté dignement. « Les gens étaient contents d’être là et ils nous l’ont fait sentir. » Les exposants eux-même, à quelques fuites de la toiture près, « ont bien travaillé, certains mieux que lors des éditions précédentes ». De fait, la concurrence était moindre dans certains secteurs. L’élargissement des allées n’est pas innocente non plus. « Elle a indéniablement amélioré le confort de tous », estime le tandem Battault-Bazin, qui s’interroge ouvertement sur la pérennisation de cette formule aérée.

La digitalisation de l’événement était une grande première pour Congrexpo. 45 000 visites sur sa plateforme en ligne, c’est un score honorable. Cela permet au passage d’éviter l’impression de 50 000 flyers (!) indiquant le plan du salon, car tout était précisé sur smartphone. Dans le même temps, on a mis les bouchées doubles sur les réseaux. « Nous avons ainsi créé des liens d’une autre nature« , apprécie Jean Battault. Très concrètement, Congrexpo a par exemple reçu le témoignage de cette dame alitée, qui a pu suivre les temps forts de l’événement.

Le carton du Savoir-faire 100% Côte-d’Or

Le thème du 100% gastronomie a été servi. Le Département de Côte-d’Or en est un bon exemple. Il n’en finit plus de vanter les mérites du Savoir-Faire 100% Côte-d’Or, en mobilisant des chefs de tous horizons et en capitalisant sur l’appellation Bourgogne Côte d’Or. Son pavillon a fait un carton.

Jean Battault applaudit : « Il n’y a jamais eu autant d’événements à la Foire de Dijon. » Cette effervescence a permis de « mettre un nom sur ce qui fait notre originalité, ce cercle concentrique de bonnes volontés, ces bénévoles fidèles ». L’Amicale des cuisiniers de Côte-d’Or était au premier rang des remerciements. « Elle a terminé rincée », louait l’organisateur, heureux aussi de voir que la profession valorise la jeunesse et le personnel en salle, « alors que le secteur connait une pénurie importante ».

En témoigne le restaurant de la foire, qui a bien tourné. « J’ai tenu personnellement à ce qu’il soit remis en valeur », insiste le président. Les chefs du groupe Hôtel Bourgogne Qualité (Gonzalo Pineiro et Damien Curie du Château Bourgogne ; Aurélien Mauny des Jardins by La Cloche ; Ralf Mestre du Central et Stéphane Fouillot du Klub) ont livré deux menus de haut niveau, avec des vins soigneusement sélectionnés par la nouvelle boutique 20 by La Cloche. « Le restaurant a fait revenir des gens et créé de nouveaux flux : du picking, soit l’acte de manger sur le pouce à l’intérieur de la foire, puis un dîner plus conséquent au restaurant. » 

Lucullus a du pain sur la planche

Pour autant, la foire gastronomique de Dijon, débarrassée définitivement de son invité d’honneur, est-elle toujours internationale ? Oui, répond son papa. Quatre pays étaient regroupés en un village : Italie, Irlande, Canada et Ukraine. Ce dernier fut d’ailleurs la bonne surprise. Jean Battault est devenu un spécialiste : « Ce pays est en train de réinventer sa cuisine, car la gastronomie est restée longtemps dans la tête des babouchkas, sans traces écrites. Chaque famille a sa recette de bortsch. Des universitaires ont carrément mené un travail de mémoire sur le sujet. De jeunes chefs se sont interrogés sur la façon d’interpréter ces fondamentaux de la cuisine. C’était très intéressant sur le plan de la civilisation. » Cette configuration sera reconduite.

Tout n’est pas à garder non plus. La Table de Lucullus, d’ordinaire pléthorique, était vide à tout point de vue. Congrexpo en convient. Certes, il était de bon ton de dépoussiérer la formule, « car 150kg de nourriture jetée chaque soir, cela posait des questions d’ordre moral ». Mais il reste encore un peu de pain sur la planche.

Car d’autres événements sont au menu. Tout en sachant que la mission de délégation de service public (DSP) qui lie Congrexpo au Parc des Expositions et Palais des Congrès s’achève fin 2022. L’équipe en place est candidate à sa succession et a déjà des idées pour la 101e édition. Pêle-mêle : proposer un concours gastronomique de haut niveau, alors que 2022 sera l’année de naissance de la Cité de la Gastronomie, et réinstaller le vin au centre de la foire, le salon Vinidivio ayant fait les frais de cette époque nouvelle. Affaire à suivre.